mardi 9 octobre 2012

Le danger de NE PAS faire de vélo…

Le billet d’aujourd’hui est la suite logique de celui du 28 septembre dernier qui portait sur 2 articles parus dans le journal La Presse à propos de la soi-disant « dangerosité » du transport scolaire. Aujourd’hui, il sera notamment question de l’envers de la médaille – qui fut hélas ignoré dans ces 2 articles – soit les bienfaits du vélo. À une différence près, cependant : l’étude de l’Observatoire Régional de Santé d’Île-de-France a tenu compte des 2 côtés de la médaille, évaluant à la fois les bienfaits et les risques d’une augmentation potentielle de la proportion des déplacements effectués à vélo.

En 2008, ces proportions étaient de 2,1% en Île-de-France et de 2,7% à Paris; des proportions légèrement supérieurs à celles observées à Montréal en 2010. Trois scénarios d’augmentation de la part du vélo d’ici 2020 ont été retenus dans l’étude, soit :

1)      Une part modale du vélo à 4% ce qui correspond aux proportions déjà observées à Grenoble, Rennes et Toulouse (et aussi à Vancouver).

2)      Une part modale de 8%, correspondant au niveau de la ville de Strasbourg, près de la frontière Allemande.

3)      Une part modale de 20% correspondant à celles de plusieurs villes Néerlandaises, Danoises, Allemandes et Belges (dans les régions néerlandophones principalement).


Les résultats

En 2020, les trois scénarios examinés permettraient de prévenir respectivement 308, 937 et 2745 décès. Il y aurait aussi une diminution de la morbidité associée au diabète de type 2, aux maladies coronariennes, au cancer colorectal, aux maladies vasculaires cérébrales et au cancer du sein. Il y aurait aussi une diminution du nombre de kilomètres parcourus en voiture avec des diminutions correspondantes des émissions de CO2 et de particules fines (PM2,5) provenant des gaz d’échappement qui représentent une cause de maladies respiratoires.

Les scénarios suggèrent que le nombre de décès et d’accidents routiers diminuerait de façon générale (c’est-à-dire dans l’ensemble de la population), mais il y aurait une légère augmentation chez les cyclistes. On parle toutefois d’une hausse très limitée de 5 à 7 décès selon le scénario. Quant à l’exposition des cyclistes aux gaz d’échappement (PM2,5), elle entraînerait une hausse de 8 à 87 décès selon le scénario. Un impact beaucoup plus important que les accidents, démontrant la nécessité d’adopter des règlements plus sévères sur les émissions de gaz d’échappement des véhicules.

En contrastant les bienfaits aux risques, les auteurs ont estimé que les bienfaits seraient largement supérieurs pour chacun des scénarios : les ratios bénéfices-risques étant respectivement de 19, 24 et 27 (voir graphique ci-dessous). De plus, il est indiqué dans le rapport que ces ratios ont été calculés en fonction des bénéfices minimaux et des risques maximaux pour produire des estimés conservateurs. Ainsi, ces ratios sont basés sur la supposition que la majorité des nouveaux déplacements à vélo proviendraient des utilisateurs du transport en commun – et non des automobilistes.

 


Comparaison avec d’autres études
 
Il est intéressant de comparer ces résultats avec ceux d’autres études similaires. À cet égard, j’ai déjà discuté sur ce blogue d’une évaluation des bienfaits et des risques du système de vélos en libre-service de Barcelone. Cette évaluation suggérait que les bienfaits étaient 77 fois supérieurs au risque (Rojas-Rueda et al., 2011).

Une autre étude a été réalisée aux Pays-Bas, là où plus du quart des citoyens vont déjà travailler à vélo (de Hartog et al., 2010). Les auteurs ont modélisé un scénario selon lequel 500 000 automobilistes décidaient d’utiliser le vélo pour les courts trajets quotidiens. Les impacts estimés illustrent une augmentation de l’espérance de vie associée à l’activité physique de 3 à 14 mois et de modestes diminutions associées aux accidents (5 à 9 jours) et aux gaz d’échappement (0,8 à 40 jours). C’est sans compter les bienfaits d’une diminution de la pollution pour la population en général.

Dans l’ensemble, ces études indiquent que les bienfaits associés au vélo sont très largement supérieurs aux risques associés aux accidents et à l’inhalation de particules fines. Il est dommage que par sensationnalisme, certains médias mettent l’emphase sur les accidents en omettant les bienfaits.


Références

de Hartog JJ, Boogaard H, Nijland H, Hoek G. Do the health benefits of cycling outweigh the risks? Environmental Health Perspectives. 2010;118(8):1109-1116.

Praznoczy C. Les bénéfices et les risques de la pratique du vélo : Évaluation en Île-de-France. Observatoire Régional de Santé d’Île-de-France; 2012.

Rojas-Rueda D, de Nazelle A, Tainio M, Nieuwenhuijsen MJ. The health risks and benefits of cycling in urban environments compared with car use: health impact assessment study. British Medical Journal. 2011;343:d4521.

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