lundi 13 août 2012

À la recherche du temps perdu…


Les cyclistes parmi vous savent probablement, qu’au moins aux heures de pointe dans les grandes villes, il est possible de circuler plus rapidement en vélo qu’en voiture. Pour l’avoir expérimenté personnellement, c’est une sensation grisante que de pédaler à 30 km/h en dépassant les voitures immobilisées pare-chocs à pare-chocs. De plus, dans mon récent voyage de cyclotourisme, lorsque je suis arrivé au traversier de Baie-Sainte-Catherine à Tadoussac, j’ai remarqué que le panneau annonçait aux automobilistes qu’ils devraient attendre plus d’une heure. Qu’à cela ne tienne, j’ai pu dépasser tranquillement toutes les voitures et attendre seulement quelques minutes avant d’embarquer sur le bateau.

Néanmoins, la plupart des gens surestiment le temps nécessaire pour effectuer un déplacement donné avec un mode de transport dit « alternatif » (vélo, marche, autobus…) tandis qu’ils sous-estiment le temps nécessaire pour un déplacement en voiture (Shannon et al., 2006). C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles plusieurs personnes optent pour la voiture.

Mais qu’en serait-il si cette perception de se déplacer plus rapidement en voiture était fondamentalement biaisée? En effet, la plupart des automobilistes ne tiennent pas compte du temps et de l’argent qu’ils doivent consacrer pour payer toutes les dépenses associées avec la possession et à l’utilisation d’une voiture (le coût de la voiture et les intérêts, l’essence, les assurances, l’immatriculation, le stationnement, etc.). S’ajoutera probablement à cette liste une taxe sur les émissions de gaz à effet de serre dans les prochaines années…


La vitesse effective

Dans les années 1970, Ivan Illich avait tenu compte de l’ensemble de ces coûts, et du temps de travail nécessaire pour les payer afin de déterminer la « vitesse effective » des déplacements des États-Uniens. Celle-ci était de 5 milles à l’heure (8 km/h), soit une vitesse que l’on peut facilement dépasser au jogging.

La semaine dernière, la Fédération des cyclistes Européens publiait une entrevue réalisée avec le professeur Paul Tranter de l’Université de New South Wales en Australie. Dans un chapitre de livre qui paraîtra cet automne, le Dr. Tranter a quantifié la vitesse effective dans de nombreuses villes à travers le monde. Ses résultats indiquent que la vitesse effective varie considérablement d’une ville à l’autre, soit de 3 km/h à Nairobi (Kenya) à 18,3 km/h à Canberra (Australie). En ajoutant les coûts externes, ces vitesses étaient encore plus basses, variant de 2,2 km/h à Nairobi à 15,9 km/h à Canberra. Même avec mon vélo de cyclotourisme chargé avec la moitié de mon poids corporel, je peux avoir une vitesse effective supérieure à celle des automobilistes de Canberra. Dans le même ordre d’idées, un nageur pourrait être plus rapide qu’un automobiliste de Nairobi.


Le lièvre et la tortue…

Cela dit, je crois que l’on devrait attribuer l’idée du concept de vitesse effective à Jean de la Fontaine, rappelez-vous de la fable du lièvre et la tortue… Aujourd’hui les acteurs ont changé : le lièvre a été remplacé par la voiture.

Référence

Shannon T, Giles-Corti B, Pikora T, Bulsara M, Shilton T, Bull F. Active commuting in a university setting: Assessing commuting habits and potential for modal change. Transport Policy 2006;13(3):240-253.

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