mardi 26 avril 2011

Encore un F pour la pratique d’activité physique chez les jeunes

C’est aujourd’hui que la version 2011 du bulletin annuel sur la pratique d’activité physique de l’organisme Jeunes en Forme Canada est rendue publique[i]. Comme c’est le cas depuis quelques années, la note F est encore une fois décernée pour la pratique d’activité physique totale. La grande différence avec les autres années, c’est que nous disposons de données encore plus rigoureuses pour appuyer ce constat d’échec. En effet, comme je l’ai indiqué dans un précédent billet, les données de l’Enquête Canadienne sur les Mesures de Santé ont révélé que seulement 7% des enfants et adolescents accumulent au moins 60 minutes par jour d’activité physique d’intensité moyenne à élevée (soit 4% des filles et 9% des garçons). Le Bulletin révèle également que les jeunes passent plus de 40 heures par semaine devant les écrans (TV, ordinateur, jeux vidéos...), soit davantage de temps qu'à l'école !

Cette année, le Bulletin a mis l'accent sur la période après l'école (15h00 à 18h00 environ). Il s'agit d'une période critique pour intégrer l'activité physique dans ses habitudes de vie. Des recherches ont montré que les jeunes qui sont plus actifs entre la fin des cours et le souper le sont également dans d'autres périodes de la journée. La page couverture du rapport montre un enfant qui débarque de l'autobus, juste en façe de la maison. On peut y lire le message suivant: "Ne laissons pas ces quelques pas être la source la plus importante d'activité physique de nos enfants après l'école".


Section sur le transport actif

Cette année, j’ai rédigé la section sur le transport actif de ce rapport. Bien que la note qui fut décernée (D) semble à priori meilleure que celle pour l’activité physique en général, cette situation est plutôt le résultat de l’absence de données récoltées auprès d’un échantillon représentatif de la population. Par conséquent, il était impossible d’attribuer une note clairement positive ou négative. À ma connaissance, les dernières données pancanadiennes sur le transport actif ont été publiées il y a 6 ans. La part modale moyenne au Canada se situait aux alentours de 30%. Au Québec, une étude datant de 1999 indique que la part modale du transport actif diminue de 40,3% à l’âge de 9 ans à moins de 15% vers la fin du secondaire (Pabayo et Gauvin, 2008).

Cela dit, voici en 3 points les faits saillants de la section sur le transport actif :

1)      Part modale : Une étude effectuée dans 67 écoles primaires de la région de Montréal et de Trois-Rivières a révélé que 30% des participants marchaient et 5,2% pédalaient (Torres et Lewis, 2010). Par contre, dès que la distance entre l’école et la maison dépassait un kilomètre, le transport actif devenait pratiquement inexistant. Les jeunes habitant les quartiers les plus faisaient davantage de transport actif que ceux qui demeuraient en banlieue, ce qui n’est pas une surprise.

2)      Bienfaits pour la santé : Une étude Québécoise a montré que le transport actif, lorsque pratiqué de façon constante, peut-être une stratégie efficace pour prévenir l’obésité infantile (Pabayo et al., 2010). Dans leur étude, ils ont suivi une cohorte de plus de 1000 enfants de la naissance à la 2è année. Les élèves qui faisaient du transport actif de la maternelle à la deuxième année avaient un indice de masse corporelle (IMC) significativement plus bas. Pour notre part, nous avons observé une plus faible prévalence de l’embonpoint et de l’obésité chez des élèves de la 4è à la 6è année qui faisaient du transport actif (30% vs. 44,6%) dans une étude qui paraîtra cet été dans le journal Pediatric Exercise Science (Larouche et al., sous presse).

3)      Manque de recherche : Notre recension des écrits suggère qu’il y a un important manque de recherche sur le transport actif, particulièrement aux niveaux suivants :

a.       Bien que plusieurs programmes font la promotion du transport actif scolaire (ex : au Québec, le programme Mon école à pieds à vélo![ii] est maintenant implanté dans 210 écoles et, dans le reste du Canada, le programme Active & Safe Routes to School[iii] est de plus en plus présent), peu d’études ont évalué l’efficacité de ces programmes, ni leurs impacts sur la pratique d’activité physique.

b.      Récemment, de nouvelles lignes directrices[iv] sur le transport actif ont été élaborées pour chacune des provinces canadiennes. Elles visent notamment à sensibiliser les décideurs à tenir compte des besoins des enfants et des adolescents dans leurs plans d’urbanisme et à améliorer les infrastructures piétonnières et cyclables. Il serait intéressant d’étudier si leur application permet d’augmenter la part modale du transport actif.

c.       Plusieurs études ont examiné les facteurs qui sont associés au transport actif, mais elles ont utilisé une méthodologie qui ne permet pas d’identifier quels facteurs sont associés à un changement des habitudes de transport. Si ces facteurs étaient mieux connus, il serait possible de concevoir des interventions plus ciblées qui seraient probablement plus efficaces.


Références
Larouche R, Lloyd M, Knight E, Tremblay MS. (sous presse) Relationship between active school transport and body mass index in Grades 4-6 children: Results from the Canadian Assessment of Physical Literacy (CAPL) study. Pediatr Exerc Sci.

Pabayo, R. et Gauvin, L. (2008). Proportions of students who use various modes of transportation to and from school in a representative population-based sample of children and adolescents, 1999. Preventive Medicine, 46(1), 63-66.

Pabayo R, Gauvin L, Barnett TA, Nikiéma B, Séguin L. Sustained active transportation is associated with a favorable body mass index trajectory across the early school years: Findings from the Québec Longitudinal Study of Child Development birth cohort.  Prev Med. 50 (Suppl. 1):S59-S64; 2010.

Torres J, Lewis P. Proximité et transport actif. Le cas des déplacements entre l’école et la maison à Montréal et à Trois-Rivières. Environnement Urbain. 14:1-15; 2010.

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